Rétrospective TOD BROWNING
Retour sur l'œuvre trop méconnue du réalisateur américain, auteur du film Freaks – La monstrueuse parade, aujourd’hui devenu culte. Cinéaste du corps, de la déformation, du désir et du travestissement, Browning s'est glissé avec habileté dans tous les genres : fantastique, policier, comédie ou mélodrame. Il a inspiré, par ses films complexes, le travail de Jacques Tourneur ou de David Lynch.
> TOD BROWNING
'Montrez la vie à l'écran pour l'amour de la vie et ne faites pas de l'art pour l'amour de l'art. La valeur de toute forme d'art dramatique se trouve dans son exactitude à dépeindre des personnages vrais exécutant des gestes vrais et disant des choses vraies'
Tod Browning
Curieuse et énigmatique carrière que celle de Tod Browning : Freaks (1930), petit bijou du cinéma américain, film culte, source d'inspiration pour des générations de réalisateurs, dissimule souvent l'œuvre prolifique et trop méconnue de son réalisateur.
Charles Albert 'Tod' Browning est né en 1880 à Louisville, ville moyenne du Kentucky. D'après ses propres dires, il aurait quitté sa famille à l’adolescence pour suivre une danseuse dans un cirque itinérant et aurait mené une carrière foraine, endossant tour à tour les rôles de bonimenteur, contorsionniste, avaleur de serpents, magicien, clown ou acteur de vaudeville.
En 1913, Browning débute à Hollywood, comme acteur dans des films de David W. Griffith. Très vite il réalise ses premiers courts métrages dans lesquels on trouve les thèmes qui marqueront son œuvre : la monstruosité, les relations semi-incestueuses entre père et fille, la mutilation. Tod Browning connaît le succès et mène grand train avec le tout-Hollywood, entre les fêtes et sa passion pour les voitures et la vitesse. En 1916 Tod Browning a un grave accident de voiture dans lequel meurt son passager, un jeune acteur. S’ensuit une longue convalescence de plus d'un an.
Assistant de Griffith sur Intolérance, il réalise ensuite son premier long-métrage Jim Blusdo (1917) qui obtient un vif succès critique. Puis il tourne à un rythme très soutenu un certain nombre de films pour Triangle et Metro Pictures. Il s'affirme comme un petit maitre du mélodrame, tout en affinant un univers particulier porté par des femmes hors-la-loi, souvent interprétées par Prisicilla Dean, jeune star montante de l'époque. Il fait alors deux rencontres essentielles pour sa carrière : Irving Thalberg, jeune et curieux producteur d'Universal, qui fasciné par l'univers de Browning le soutiendra jusqu'au bout. Et Lon Chaney, acteur, né de parents sourds et muets, lui aussi issu des planches. La première collaboration entre Tod Browning et Lon Chaney sera The Wicked Darling en 1919. Après une série de films réalisés pour Universal et Gothic pictures et malgré de sérieux problèmes d'alcoolisme qui remettent en cause sa fiabilité professionnelle, Browning réalise The Unholy Three (1925), avec Lon Chaney dans le rôle principal et Irving Thalberg à la production. Le film est un succès phénoménal. Chaney et Browning continuent leur fructueuse collaboration : The Blackbird (1926), (1926), The Road to MandalayThe Unknown (1927), London after midnight (1927), The Big City (1928), West of Zanzibar (1928), Where East is East (1929). On retrouve dans ces œuvres les sujets chers à Tod Browning: le rapport complexe de l'homme à ses pulsions animales, le monde interlope, le macabre, l'infirmité, la mutilation. Ces thèmes qui hantent son œuvre de façon quasi-obsessionnelle sont portés magnifiquement par 'l'acteur aux mille visages', monstre sacré des transformations et des maquillages, roi du simulacre et du grotesque, du corps désirant, furieux et démesuré, interprète idéal, Lon Chaney. L'acteur meurt en 1930 au moment où Tod Browning passe au cinéma parlant.
Tod Browning est désormais reconnu comme le spécialiste de l’étrange et c’est logiquement qu’on lui confie Dracula (1931). Browning y dirige sa découverte, le comédien Bela Lugosi, première et inoubliable incarnation de la créature de Bram Stoker. Ne voulant pas être en reste avec cet énorme succès des studios Universal, la MGM engage Browning avec pour seule mission de faire 'encore plus horrible'. Mais Freaks sera mal-aimé par le public qui, choqué, provoquera la disgrâce de Browning. Seuls quatre films lui seront confiés après coup ; il arrêtera définitivement de tourner en 1939 après Miracles for Sale. Tod Browning vit dès lors reclus, se consacrant à des collections diverses et perfectionnant ses tours de magie. Il meurt en 1962.
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