PANORAMA DU MOYEN METRAGE AMERICAIN CONTEMPORAIN
A l’ombre de la matrice hollywoodienne, de ses blockbusters aussi bien que de ses produits pseudo indépendants inféodés aux majors, subsiste un cinéma américain qui revendique sa singularité et s’en nourrit.
Milford Thomas réalise avec une vieille caméra 35 mm à manivelle son délicieux et subversif pastiche de film muet, Claire, que vous pourrez découvrir en ciné-concert. Jay Rosenblatt poursuit avec Phantom Limb une œuvre audacieuse entamée dans les années 80 qui interroge son héritage familial et l’histoire collective. Carter Smith explore avec Bugcrush le côté obscur et violent de la sexualité adolescente contemporaine.
Avec l’avènement d’internet s’est développée une nouvelle façon de financer, de produire et de distribuer des projets courts, longs ou moyens qui n’auraient pu voir le jour auparavant. Financement participatif, organisation de cinéastes en réseau, réappropriation des nouvelles technologies digitales, distribution hors du circuit classique de la salle auront favorisé l’émergence et le développement de films à coûts extrêmement réduits pour lesquels la question de la rentabilité devient accessoire.
C’est la vague libre et décomplexée du mumblecore, faisant fi de tout formatage technique et dramatique et arpentant l’ensemble du territoire américain, loin des terres californiennes ou new-yorkaises qui dominent la fiction traditionnelle. Aaron Katz réalise en équipe réduite le lumineux Dance Party, USA depuis son Portland natal. à base d’auto-fiction, d’improvisations, de débrouille, des cinéastes comme Joe Swanberg, basé à Chicago, (plus de 20 films en 15 ans dont Marriage Material) ont établi une nouvelle façon de penser le cinéma. Kentucker Audley, acteur et réalisateur (Holy Land) issu du mouvement a, lui, créé NoBudge : une plateforme internet de diffusion en libre accès sur laquelle a pu être découvert notamment Trinidad, la journée d’un adolescent noir dans les quartiers sinistrés de Detroit, premier film du photographe Iain Maitland.
Loin des préoccupations du mumblecore, Lake Nowhere, deuxième réalisation commune de Christopher Phelps et Maxim Van Scoy revisite avec humour et une terrible efficacité les premières heures du slasher.
Enfin, deux films très récents clôtureront ce panorama éclectique, The Illinois Parables, exploration poétique et idéologique de quatorze siècles d’histoire de l’Illinois par Deborah Stratman, figure de proue du documentaire expérimental des deux dernières décennies. Et enfin, Fraud de Dean Fleischer-Camp, frénétique détournement d’images familiales diffusées sur Youtube qui tend à l’Amérique consumériste d’aujourd’hui un miroir glaçant.
Parallèlement à ce tour d’horizon, une séance spéciale consacrée à Spike Jonze où seront diffusés I’m Here et Scenes from the Suburbs complètera cette exploration à travers quinze années des lisières les plus fécondes de la création cinématographique américaine contemporaine.
Frank Beauvais
In the shadow of the conventional Hollywood mould, its blockbusters and its pseudo-independent products which are entirely controlled by the majors, there is a type of American cinema positing and feeding off its uniqueness.
Using an old 35mm camera, Milford Thomas cranks out his delicious and subversive silent film pastiche, Claire, which you can watch at the cine-concert. Jay Rosenblatt follows with Phantom Limb, a bold work begun in the 80s which questions his family legacy and shared history. In Bugcrush, Carter Smith explores the dark and violent side of contemporary adolescent sexuality.
With the arrival of the internet, there has developed a new way to finance, produce and distribute short, medium-length and feature film projects which would never previously have seen the light of day. Crowdfunding, filmmakers organising themselves into networks, reappropriation of new digital technologies and distribution outside conventional cinema venue circles have led to the emergence and development of extremely low-cost films, for which profitability becomes incidental.
This is the free, uninhibited wave of mumblecore, which eschews technical and dramatic moulds and is making great strides across America, a long way from the worlds of California or New York which dominate conventional drama. In a small team, Aaron Katz directs the radiant Dance Party, USA from his native Portland. Using autofiction, improvisation and resourcefulness, filmmakers such as Joe Swanberg, based in Chicago (more than 20 films in 15 years, including Marriage Material), have established a new way of thinking about cinema. Kentucker Audley, actor and director (Holy Land) and part of the movement, created NoBudge: an open-access internet sharing platform on which could notably be found Trinidad, a day in the life of a black teenager in the devastated Detroit suburbs; the debut of photographer Iain Maitland.
Far from the concerns of mumblecore, Lake Nowhere, the second joint work by Christopher Phelps and Maxim Van Scoy, humorously and highly effectively revisits the emergence of the slasher.
Two very recent films will close this eclectic panorama: The Illinois Parables, a poetic, ideological exploration of fourteen centuries of Illinois history by Deborah Stratman, a leading figure of experimental documentary over these past two decades. And finally, Fraud by Dean Fleischer-Camp, the frenzied appropriation of family images shared on YouTube, which holds a chilling mirror up to today’s consumerist America.
Alongside this overview, there will be a special session dedicated to Spike Jonze which will feature I’m Here and Scenes From the Suburbs and will complete this exploration of fifteen years of the most fertile margins of contemporary American cinema.
